Voici les trois films proposés aux éléves de 6e 5e pour l'année 2023 2024 Vous trouverez sur cette page toutes les informations sur les films et des liens vers des supports pédagogiques vous permettant de préparer votre séance. Nous vous souhaitons une belle année cinématographique avec vos classes !
Le catalogue des films pour l'année 2023 2024 est en cours de préparation.
Ashley Ray, Engel Morris, Orkin Ruth | 1953 | Etats-Unis
Un quartier populaire de Brooklyn, dans les années 50. La mère confie à Lennie la garde de son petit frère, Joey, car elle doit se rendre au chevet de leur grand-mère. Agacé de devoir veiller sur son petit frère alors qu’il avait prévu de passer le week-end avec ses copains dans un parc d’attractions à Coney Island, Lennie fait une farce de mauvais goût à Joey. Persuadé d’avoir causé la mort de son grand frère, le petit garçon s’enfuit à Coney Island, immense plage new-yorkaise dédiée aux manèges et à l’amusement. Il va passer une journée et une nuit d’errance au milieu de la foule et des attractions foraines.
Télécharger le dossier pédagogique : https://www.cnc.fr/documents/36995/153715/Petit+Fugitif+%28Le+%29.+Cahier+de+notes+sur….pdf/34b75f33-2883-b8cd-7e8d-172ac3244061
La page du film sur Nanouk https://nanouk-ec.com/films/le-petit-fugitif
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autour du film
Sous ses airs de kid movie dans la droite lignée du Kid de Chaplin et de la série des Petites Canailles, Le Petit Fugitifmagnifie les contradictions de l’enfance. Il faut voir avec quelle acuité les réalisateurs parviennent à faire de la virée du petit Joey dans le parc d’attractions une immense balade initiatique. Quasiment sans dialogue, Ashley, Engel et Orkin captent les sentiments contradictoires qui assaillent le petit garçon, de la culpabilité (celle d’avoir peut-être tué son frère) à la joie (de vivre un rêve éveillé au milieu des manèges) en passant par la peur, l’insouciance, la méfiance… Esquissé avec finesse, le parcours de Joey à Coney Island fait figure de récit d’apprentissage : l’enfant y apprend notamment la responsabilité et le partage, avant de retrouver son frère qui aura, par la même occasion, appris deux ou trois choses sur la valeur de la vérité.
Le Petit Fugitif n’est pas pour autant un conte moralisateur destiné à faire peur aux petits enfants fugueurs : les réalisateurs montrent l’enfance sans chichis et avec tendresse, sans en atténuer les mauvais côtés ni trop jouer sur la bouille attachante du petit héros. C’est que quelque chose de totalement novateur vient appuyer le discours des cinéastes : la mise en scène. Tourné à l’arrachée dans les rues de Brooklyn, au pied des immeubles et sur la plage de Coney Island, dans les parcs d’attraction et dans les rames de métro, Le Petit Fugitif pose les bases de la révolution cinématographique à venir. Caméra posée à même le sol ou portée à l’épaule, son en prise directe, cadrages insensés : la réalisation épouse le propos avec panache. Le sentiment d’incroyable liberté éprouvé par le petit Joey transparaît à l’image et l’on se faufile avec lui entre les jambes des passants, près des stands de tir et des manèges, entre les corps étalés sur la plage. La scène où le petit garçon, enivré par la ronde d’un carrousel, se laisse envahir par le bruit, la peur et la culpabilité (d’avoir tué son propre frère et de se sentir si libre) est, à ce titre, exemplaire.
Fabien Reyre, Critikat 10 février 2009
A sa sortie en 1953, aux dires de François Truffaut, Le Petit Fugitif convainc l’ensemble de la critique et influence bon nombre de cinéastes de la Nouvelle Vague. Véritable bijou injustement négligé par l’histoire du cinéma, le film d’Engel, Orkin et Ashley marque dans un même élan les débuts du film indépendant américain et de l’un de ses plus éminents représentants, John Cassavetes. Avec sa caméra à hauteur d’enfant, le long-métrage oscille constamment entre documentaire urbain et aventure naïve. La simplicité de l’intrigue – un petit garçon fugue suite à une mauvaise blague de son aîné et erre un week-end entier dans un parc d’attractions – prend à contre-pied les scénarios alambiqués et mélodramatiques hollywoodiens. Au détour des tribulations de l’enfant, c’est toute une époque et une atmosphère qui prennent vie. Filmé en extérieurs par une équipe réduite au maximum, Le Petit Fugitif parvient à captiver sans aucun temps mort. En écho au néoréalisme italien, la spontanéité et le naturel du jeune acteur compte pour beaucoup dans la crédibilité et l’attachement au film. Sa bouille édentée, tantôt souriante tantôt déconfite, inscrit implicitement à l’écran les rêves étouffés d’un gamin issu d’une famille modeste. 56 ans après sa sortie, la reprise du Petit Fugitif new-yorkais promet de rares instants de complicité et un émouvant moment de cinéma.
Laurence Gramard, evene.fr 10 Février 2009
Le film se révèle doublement passionnant. Formellement, il entérine, sept ans avant A bout de souffle, le moment moderne comme un champ de possibles découvert par un sursaut technique : à l’origine de la facture documentaire du film (images volées au cœur de la foule, sur le mode du photo-reportage urbain – Engel fut l’élève de Berenice Abbot), il y a l’invention d’une petite caméra révolutionnaire, une caméra 35mm compact bricolée par un ami de Engel et qui allait faire fantasmer Godard au point que celui-ci dépêcha Raoul Coutard à New York pour étudier l’engin de plus près, et tenta même de l’acquérir. Mais, plus encore peut-être, c’est son récit qui n’en finit pas de renvoyer au tournant moderne. Un enfant erre : ce serait le pitch, et c’est, surtout, une proposition chargée d’échos, en amont (par exemple, Allemagne année zéro), comme en aval (forcément, Les 400 coups). Joey, kid de Brooklyn typiquement américain (Converse et colt en plastique) se voit confié à son frère aîné tandis que la mère se rend au chevet de leur grand-mère malade. L’aîné lui joue alors un tour cruel, feignant un accident de carabine qui va obliger le petit à prendre ses jambes à son cou et à fuir en direction de Coney Island, où il passera le week-end seul, vagabondant entre la plage et les manèges.
La première partie, à Brooklyn, est très belle, et elle annonce tout un pan du réalisme new-yorkais, de Shirley Clarke à Cassavetes. Mais c’est évidemment la déambulation de Joey parmi les attractions de Coney Island qui constitue le cœur du film. Si l’enfant est un personnage-clef du cinéma moderne, c’est que, expliquait Deleuze à propos de De Sica et Truffaut, « dans le monde adulte, l’enfant est affecté d’une certaine impuissance motrice, mais qui le rend d’autant plus apte à voir et à entendre ». C’est exactement ce qui est en jeu dans ce récit d’apprentissage où le monde des adultes est réduit, dans les yeux du marmot, à la dimension d’un fête foraine : un moment d’errance pure, à la fois enchanté (livré à lui-même, le môme s’en donne à cœur joie) et anxieux, où le monde est tout à la fois expérience et spectacle, et se donne en chaque image, dans les relents sucrés de la barbapapa, comme une première fois.
Jérôme Momcilovic, Chronicart.com
Steven Spielberg
États-Unis (1982)
Une soucoupe volante atterrit en pleine nuit près de Los Angeles. Quelques extraterrestres, envoyés sur Terre en mission d’exploration botanique, sortent de l’engin, mais un des leurs s’aventure au-delà de la clairière où se trouve la navette. Celui-ci se dirige alors vers la ville. C’est sa première découverte de la civilisation humaine. Bientôt traquée par des militaires et abandonnée par les siens, cette petite créature apeurée se nommant E.T. se réfugie dans une résidence de banlieue. Elliot, un garçon de dix ans, le découvre et lui construit un abri dans son armoire. Rapprochés par un échange télépathique, les deux êtres ne tardent pas à devenir amis. Aidé par sa soeur Gertie et son frère aîné Michael, Elliot va alors tenter de garder la présence d’E.T. secrète.
Pour aller plus loin : la fiche éléve et le dossier enseigant
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Pistes de travail
Un premier thème (d’ailleurs récurrent dans l’oeuvre de Steven Spielberg) : l’enfance (à travers le personnage principal d’Elliott) : en en abordant différents aspects :
1. L’enfance au sein d’une famille « hors-normes » pour l’époque (les années 80) puisque le père est absent (parti ? divorcé ?).
2. La fratrie : la place de cadet d’Elliott n’est pas facile : entre son grand frère Michael, adolescent, qui le rejette, et sa petite soeur Gertie, le bébé de la famille.
3. L’âge charnière (10/11 ans) que vit Elliott. Il est en train de vivre ses tous derniers moments d’enfance avant d’entrer dans l’adolescence : Il est encore un petit garçon, émerveillé par les histoires que raconte sa maman à sa petite sœur le soir (scène où Elliott et E.T. sont cachés dans le placard de la chambre). Il est capable de vivre des aventures extraordinaires, sans être encore trop pragmatique, raisonnable, vivant comme un jeu de cache-cache, d’aventure. E.T. est son jouet ultime, interactif (à la fois régressif, lorsqu’il est parmi les peluches de la petite sœur et jouet du futur lorsqu’il essaie de communiquer avec sa planète en utilisant sa « technologie »). E.T. est aussi peut-être l’ami imaginaire que s’inventent certains enfants. Mais, les prémisses de l’adolescence sont là : il se méfie de la réaction de sa mère si elle découvre E.T., il se défie du monde des adultes. Les premiers signes de rébellion sont là : il n’a plus une confiance inconditionnelle en sa mère, l’insouciance n’est plus de mise. La solitude, ressentie à cet âge, où l’on n’est plus tout à fait un enfant et pas encore un adulte, est partagé avec E.T., confronté à un entre-deux mondes : sa planète et la Terre. Le petit extra-terrestre est d’une certaine manière Elliott, confronté à un monde effrayant (celui de l’adulte), qui jusqu’à maintenant lui était encore étranger même s’il est attirant.
4. L’enfant ‘enfant contre l’adulte : le merveilleux, l’intelligence, l’humanité, la spontanéité contre la réalité, la bêtise, l’égoïsme (n’engendre que des familles dysfonctionnelles), la froideur (calculateur et méfiant face à E.T. ne cherchant qu’à se protéger ou à l’étudier pour l’utiliser).
Un autre thème : l’amitié : entre Elliott et E.T., par delà les différences, par delà la distance qui les sépare. Thème lié à un autre thème : la tolérance, le « racisme » : l’autre (E.T.) étant perçu comme un être à part entière riche de toutes ses différences par Elliott ou au contraire étant pris pour un danger, une menace venu d’ailleurs, de l’ »étranger » ou pour un cobaye, un animal, une autre espèce à étudier, et non pour un être à part entière doué d’intelligence par les adultes.
un film de Aki Kaurismaki
Marcel Marx a remisé ses ambitions et ses succès d’écrivain, autant que sa vie de bohême. Il s’est installé au Havre, dans un vieux quartier, en compagnie d’Arletty, qui partage sa vie, et de sa chienne Laïka. Il gagne maintenant sa vie en cirant des chaussures à la gare. Il est témoin de la découverte par la police d’un container rempli de clandestins africains. Un enfant parvient à s’échapper. Marcel part à la recherche du gamin et, lorsqu’il l’a retrouvé, l’héberge. Le petit Idrissa veut rejoindre sa mère en Angleterre. Mais comment ? Marcel et tout le quartier vont lui venir en aide, tandis que l’ambigu commissaire Monet et un détestable voisin rôdent dans les parages.
Pour aller plus loin : le dossier pédagogique CNC
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Autour du film
Aki Kaurismäki est de ces voyageurs qui retrouvent à chaque destination ce qu’ils ont laissé derrière eux. Au Havre, il s’est installé dans le décor d’Auguste Perret, l’architecte qui reconstruisit la ville après la seconde guerre mondiale, dans l’histoire d’un port façonné par la guerre et le commerce. Il l’a peuplé d’une humanité laborieuse, où l’on retrouve des figures familières : André Wilms, Kati Outinen, Jean-Pierre Léaud.
Comme il est question d’immigrés clandestins, de dénuement et de cancer, on redoute un instant qu’Aki Kaurismäki ne soit en proie à un accès de mélancolie, comme celui qui a donné Les Lumières du faubourg (2006), son dernier film en date, exemple parfait de désespoir politique et cinématographique. Mais les éclats de rire qui vous secouent bientôt rassurent sur le caractère du film. Au pessimisme ambiant, Aki Kaurismäki oppose le burlesque et la solidarité de classe.
D’ailleurs, son héros porte le patronyme des plus illustres représentants de ces deux valeurs. Comme Groucho et Karl, il s’appelle Marx, Marcel Marx. Il a le visage en lame de couteau d’André Wilms et sa diction impeccable. Il exerce le métier désuet de cireur de chaussures en gare duHavre.
C’est un filou, à la Charlot, toujours prêt à chaparder et à se carapater. Il vit dans une petite maison avec sa douce, qui répond au joli nom d’Arletty, même si elle ressemble à s’y méprendre à Kati Outinen.
Cette existence précaire est bouleversée par la maladie d’Arletty, qui se déclare le jour même où un jeune immigrant africain, Idrissa (Blondin Miguel, au regard mélancolique), échappe à la police et finit par se réfugier chez Marcel Marx.
Monde nostalgique
Ce qui attire l’attention du commissaire Monet. En l’espace de quelques jours, Jean-Pierre Darroussin, qui incarne le policier tout de noir vêtu, passe ainsi de Jean Valjean (ange tutélaire de son personnage dans Les Neiges du Kilimandjaro, de Robert Guédiguian, montré lors d’Un certain regard) à l’inspecteur Javert. Idrissa trouve asile non seulement auprès de Marcel, mais aussi de tout le quartier.
Aki Kaurismäki ne raconte pas autre chose que Philippe Lioret dans Welcome (2009). Il montre même, sur un écran de télévision, des images de la destruction de la « jungle » de Calais, le 22 septembre 2009, où s’étaient regroupés les demandeurs d’asile. De cette réalité, il entreprend de faire un monde enchanté et nostalgique.
Cet enchantement tient à l’architecture du Havre, aux vieilles voitures (le commissaire Monet roule en R16) et, surtout, à une manière de faire du cinéma étroitement liée aux origines de l’art. Ses plans fixes, ses panoramiques méthodiques induisent une géométrie du monde légèrement dérangée par un sens permanent de l’absurde.
Les policiers des frontières qui pourchassent Idrissa ont ainsi l’honneur de devenir les descendants directs des Keystone Cops qui poursuivaient Mack Sennett, et la pauvre Arletty, assaillie par la maladie, est l’héroïne d’un mélodrame hollywoodien des années 1920.
C’est sans doute cette parenté avec le cinéma muet qui permet à Kaurismäki de se tirer d’une situation souvent fatale. Les films se remettent mal d’avoir été réalisés par des cinéastes qui ne parlent pas la langue de leurs acteurs. Ici, Darroussin, Wilms, Evelyne Didi (en boulangère au cœur d’or), s’emparent de dialogues minimalistes pour en tirer tout le parti comique qu’ils recèlent.
Il suffit enfin d’un peu de musique pour que cette fête de la résistance à la fatalité soit complète. Kaurismäki est allé chercher des chansons de Damia et, dans le quartier du Havre où il tournait, il a rencontré Little Bob, légende du rock havrais (et français) qui tient un petit rôle et chante une chanson à la gloire de son père, immigré italien. En noir et blanc, en couleurs, à trois ou à quatre temps, Aki Kaurismäki ne baisse pas les armes.
Thomas Sotinel / Le Monde 14 avril 2011
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